Le docteur Jean-Marie Faroudja est président de la section éthique et déontologie du Conseil National de l'Ordre des Médecins.
Il a déclaré ne pas s’opposer à l’ouverture de la PMA aux femmes seules et aux couples de femmes : « Le rôle des médecins est d’apaiser les souffrances, qu’elles soient physiques ou psychologiques. Or, le désir d’enfant est une souffrance et le médecin est là pour l’entendre (…) Si la société veut une AMP élargie, nous estimons que c’est à elle de trancher ».
Dans un premier temps, l'Ordre des médecins a analysé son code de déontologie médicale, c'est à dire l'ensemble des dispositions législatives réglementant l'exercice médical, afin de vérifier si ils y trouvaient un article qui dise que la PMA pour toutes serait contraire à la déontologie. "Il n’y a qu’un seul article sur ce sujet-là, l’article 7 sur la non-discrimination, qui explique que le médecin doit soigner tous les patients avec le même souci, le même soin, en faisant fi de leurs convictions personnelles, religieuses, politiques, de leurs modes de vie etc. Il n’y a donc pas d’article de déontologie que l’on puisse opposer à ce projet".
Puis, ils se sont interrogés d’un point de vue éthique : d'après eux, les principes éthiques sont l’autonomie, la bienfaisance, l’absence de malfaisance, l’équité et la justice.
- L’autonomie, c'est le respect du choix du patient et celui du médecin
- La bienfaisance, c'est répondre à une souffrance ce qui est le rôle du médecin. En revanche, ce qui n'est pas le rôle du médecin, c'est de juger de la moralité de la demande.
- L’absence de malfaisance : la PMA pour toutes n’est pas malfaisante en soi. Les droits de l’enfant ont été évoqués mais il n’appartient pas à l’Ordre des médecins de se prononcer dessus.
- Équité et justice : "il est évident qu’une femme qui est à la frontière d’un pays qui pratique l’AMP n’aura qu’à passer la frontière et obtenir ce qu’elle cherche, alors qu’une femme qui habite dans le Massif central, avant de passer la frontière, elle aura des tas de frais, et peut-être renoncera-t-elle à son projet".
L'engagement de l’Ordre des médecins c'est être au service des médecins dans l’intérêt des patients. Cet organisme est de droit privé et est chargé d’une mission de service public. Il défend l’honneur et l’indépendance de la profession médicale qu’il représente auprès de l’ensemble de la société française (pouvoirs publics, citoyens…). C’est la seule institution française qui rassemble et fédère l’ensemble des médecins, quel que soit leur statut, leur âge, leur mode d’exercice, leur spécialité…
L’Ordre des médecins est chargé, par la loi, de veiller au respect, par tous les médecins, des principes du code de déontologie médicale.
Le Conseil national de l'Ordre des Médecins est constitué de 54 membres élus par les conseils départementaux ; un membre désigné par l’Académie de médecine et un Conseiller d’État nommé par le Garde des Sceaux.
Il comporte quatre sections : éthique et déontologie ; exercice professionnel ; santé publique et démographie médicale ; formation et compétences médicales.
L'ordre des médecins est du même avis que le docteur Jean-Marie Faroudja sus-cité, il s'interroge sur les grands principes éthiques que questionnerait une extension, afin d'éviter les dérives commerciales. Voici deux extraits choisis sur leur site internet : https://www.conseil-national.medecin.fr/node/2929 (
"-L’autonomie de la personne. Celle-ci doit être respectée, tout comme celle du médecin : laisser à la femme le libre-choix, laisser au médecin le choix de sa réponse, en respectant le principe de non-discrimination. Se pose certes la question de l’articulation entre clause de conscience et non-discrimination, mais il est certain qu’un refus qui reposerait uniquement sur les orientations sexuelles de la femme faisant une demande d’AMP pourrait être constitutif d’une discrimination ;
-La bienfaisance. Répondre à une demande d’AMP, c’est répondre à la souffrance d’une personne. Cette souffrance, le médecin doit l’entendre au même titre que les autres, avec empathie et disponibilité ;
-L’absence de malfaisance. Accompagner dans un tel projet, s’empêcher de tout prosélytisme, écouter, conseiller : le médecin ne saurait être malfaisant sauf s’il opposait un refus catégorique ;
-La justice. Comment apprécier l’inégalité de possibilités lorsque l’on sait que certaines femmes peuvent mener à bien ce qui leur tient tant à cœur parce qu’elles en ont les moyens, celui de se déplacer hors de nos frontières ou de faire face à des frais divers ?
Il semble clair que l’extension de la PMA telle qu’elle est aujourd’hui proposée ne trouve pas d’obstacle majeur face aux règles fondamentales de l’éthique du médecin. Les quatre principes cités précédemment ne seraient en aucun cas ébranlés par une éventuelle évolution de la loi en faveur des femmes seules ou homosexuelles en couple."
"L’Ordre ne doit pas être une instance moralisatrice face à une demande sociétale. Si la société veut une AMP élargie aux femmes seules ou homosexuelles en couple, c’est à elle de trancher. L’Ordre ne peut s’y opposer. De quel droit l’Ordre des médecins pourrait-il s’opposer au projet d’une personne désirant un enfant et qui souffre de cette situation ? N’est-il pas du devoir du médecin, en dehors de tout prosélytisme, d’apaiser les souffrances physiques et psychiques et d’accompagner la personne dans la réflexion à mener au sujet de sa demande ?"
Raphaël Nogier est un médecin français, diplômé de la faculté de médecine de Tours. Il est aujourd’hui président du Groupe Lyonnais d’Études Médicales qui regroupe environ trois cents médecins tournés vers la médecine clinique. Par ailleurs, le docteur Raphaël Nogier est engagé dans la défense d’une médecine respectueuse de l’Homme et de la Nature.
Le docteur Raphael Nogier est un des 1600 signataires du manifeste des médecins opposés à la PMA, dans lequel ils expliquent vouloir rappeler le rôle de la médecine : soigner des malades, soulager la souffrance et éventuellement prévenir les maladies. Dans ce contexte là ce n'est pas le rôle du médecin d'effectuer une PMA pour satisfaire le désir d'une femme en bonne santé qui pourrait avoir un enfant dans des conditions normales et naturelles, le désir n'étant pas une pathologie. Il pense ainsi qu'il faut respecter la médecine est la Nature.
Par ailleurs, cette PMA pour toutes créera selon lui une injustice car des enfants n'auront pas de père, pas de référent paternel et pas non plus de généalogie paternelle. "La majorité des Français portent le nom de leur père. Eux, ils ne porteront pas le nom de leur père puisqu'ils ne le connaîtront pas." Or, le rôle de la médecine c'est d'être juste. "Les lois internationales le disent. Il faut toujours prendre l’intérêt supérieur de l’enfant. Cela veut dire que dans une situation où l’enfant est impliqué, il faut toujours faire passer l’enfant avant. L’égalité pour l’enfant, c’est d’aider les enfants à avoir un père et mère."
Raphaël Nogier remet en cause la légitimité du Comité consultatif national d'éthique : "Leur avis, c'est du théâtre. La majorité des membres du CCNE a été nommée par le gouvernement précédent. Il n'aurait pas nommé des membres opposés à l'extension de la PMA. C'est un théâtre pathétique"
D'après lui, "beaucoup de personnes ont intérêt à étendre la PMA, le marché est considérable, il y a 2 milliards d'euros qui sont prévus dans les années qui viennent, c'est un eldorado de la PMA"
Enfin, il pense qu'on est "en train d'ouvrir la porte à la congélation des ovocytes, les dons de sperme, et à l'exploitation du corps humain."
Voici un extrait choisi du manifeste des médecins sur leur site internet :
"Nous, médecins, impliqués dans la vie quotidienne de nos concitoyens voulons par ce manifeste rappeler quels sont les rôles, les limites et les exigences de notre profession.
Les tentations sont grandes pour les pouvoirs publics et les usagers de s’approprier les techniques biomédicales à des fins partisanes. Nous mettons en garde contre ces tentations.
Nous rappelons que :
1) La Médecine est avant tout un art au service des malades. Les deux principaux buts de la Médecine sont prévenir les maladies et soigner les malades.
2) La première devise du médecin est : « Primum non nocere », « Premièrement, ne pas nuire ».
3) Il n’appartient pas au médecin de juger de la vie. Même s’il doit accompagner les couples stériles en désir d’enfant, le médecin n’a pas tous les droits pour faire surgir la vie.
4) Le médecin ne doit pas être au service d’une idéologie quelle qu’elle soit. La sélection des races, l’eugénisme, le dopage, les expériences sur l’homme, la « fabrication » d’enfants en dehors de la complémentarité homme-femme sont étrangers aux buts de la Médecine.
5) Il revient au Conseil de l’Ordre des Médecins, expression de notre profession, de faire respecter les règles de la déontologie médicale.
6) Le médecin est soumis à la loi en tant que citoyen. L’État quant à lui ne doit pas sortir de son rôle en demandant au médecin d’accomplir des actes techniques contraires à l’éthique médicale."